Petite moi perdue

[Aelia]

Alors... je préfère vous prévenir, je vais probablement pondre une sacrée tartine. Peut-être que ça m'aidera à y voir plus clair et peut-être que si j'y arrive pas toute seule, une âme charitable pourra me donner quelques conseils utiles (ou inutiles, j'apprécierai quand même l'intention !)

Par où commencer ... J'ai commencé à me dire que je n'étais pas hétéro vers 20 ans. Sur le moment, quand j'ai réalisé que les demoiselles me faisait de l'effet, ça m'a un peu surprise parce qu'il me semblait bien que j'étais amoureuse d'un garçon. Le garçon en question ne voulant pas de ma petite personne, j'ai décidé que je n'étais pas amoureuse de lui, que ce n'était que mon esprit qui cherchait à s'auto cacher la vérité. Comme j'avais quand même un doute et qu'un pote m'a dragouillée, je me suis laissée faire, pour voir si ça me plaisait (j'en conviens, c'est pas méga classe). Après avoir roulé deux ou trois pelles à ce garçon, je me suis rendue à l'évidence, j'aimais vraiment pas ça. Dans ma petite tête, c'était tranché, j'étais lesbienne.

J'ai donc naturellement fini par avoir une relation avec une fille. C'était chouette. Plus chouette que d'embrasser des garçons. Du coup j'ai continué à embrasser des filles (enfin celle là). Puis bon, ça c'est terminé, c'est des choses qui arrivent. Comme ça c'est pas passé de manière très propre, que je suis quelqu'un de très timide et de très complexée, je n'ai finalement eu de vraie relation qu'avec cette personne. Comme j'ai quand même 27 ans, ça me complexe encore plus et du coup je m'en sors pas.

Enfin, ça encore, c'est pas trop le problème du moment. Le problème du moment, c'est que ça fait des années que je ne suis attirée que par des filles. Et là, d'un coup, bam, sans prévenir, voilà pas qu'un mec me fait de l'effet. Mais pas genre "oh il est mignon", ça ça m'arrive souvent, plutôt genre si je croise son regard j'ai l'air d'une collégienne, je sais plus parler, je deviens rouge et je perds 90% de mon QI.

Alors je regarde en arrière. Je me demande si mon raisonnement a planté quelque part ou si c'est mon coeur et mes hormones qui bug d'avoir été trop longtemps inactifs. Et y'a un truc quand même... c'est que ce garçon que j'ai embrassé pour savoir si j'aimais ça ou pas, il embrassait quand même SUPER MAL. Et que, quand bien même j'aurais été hétéro, j'aurais pas aimé ça.

Du coup, je sais plus. Je me dis que je n'ai qu'à plus y penser, que c'est juste trop de solitude, que ça passera mais bien sûr, ça marche pas. Alors je me dis que je devrais tenter, mais j'ai aucune expérience avec les hommes et ça me bloque.

Dans tous les cas, je me dis que si je ressens ça, c'est qu'il y a baleine sous gravillon et qu'il faudrait quand même que j'éclaircisse ça parce que ça se trouve, ça fait des années que je passe à côté d'une partie de moi, et c'est quand même plutôt con.

Je sais que je suis la seule à avoir la réponse, mais si quelqu'un se reconnaît même vaguement, juste de savoir que je suis pas la seule à m'être plantée d'étiquette et à être sortie d'un placard pour rentrer dans un autre, ça me rassurerait ^^"

[SCANNO]

bonjour nouvelle camarade bienvenue! Ton message laisse entendre que tu te sens un peu perdue ; rassure-toi, ça n'est ni grave ni rare. Nous vivons dans un contexte culturel qui n'aide pas à se définir quand on a des doutes, et où l'inconscient collectif ne reconnaît que deux "placards" bien cloisonnés, un dominant ("hétéro") et un minoritaire ("homo"), alors se découvrir, et s'assumer "bi", ça n'est facile pour personne ou presque, et la majorité d'entre nous ont connu ces difficultés.
Ce que tu découvriras rapidement ici, c'est d'abord que la vision des deux placards est très simpliste, et ne correspond pas à la réalité ni à la nature profonde des êtres humains. Il n'y a pas de placard, il n'y a que des rôles sociaux dont on ressent à un moment, ou par le hasard des expériences et des sentiments qu'on est fait plutôt pour jouer celui-ci ou celui-là etc... Et rien n'est jamais vraiment définitif ni "tranché" comme tu dis. Nous sommes des animaux sexuels et sensuels avant tout: on peut préférer l'un ou l'autre sexe toute sa vie, ou bien ressentir le besoin des deux toute sa vie, ou encore fonctionner par périodes alternées, toutes les combinaisons sont possibles...Je ne sais pas si ce que je te dis t'aidera beaucoup, mais j'espère déjà que ça t'évitera de trop te prendre la tête et surtout de culpabiliser! Je pense que tu es au bon endroit pour faire le point: lis tous les témoignages que tu peux, discute et n'hésite pas à poser des questions; tu verras que ça t'aidera à poser les choses plus clairement, et sans doute trouveras-tu quelqu'un ici qui a connu la même phase que tu traverses actuellement.
Je te souhaite du courage et un séjour profitable parmi nous!

[Ptiboudin]

Je n'aurai pas mieux répondu que Scanno. En terme d'amour et de sexualité tout est possible dans l'espèce humaine, et rien n'est vraiment définitif.
Manque de bol, cette même espèce humaine adoooore les classements, adore ranger, trier...adore les cases même si objectivement ces cases n'ont pas lieu d'être. Je comprends que ne pas savoir où se situer parmi toutes ces cases fait peur, destabilise, on se sent seuls, isolés. Perdus. J'ai ressenti ça moi aussi.
Mais fondamentalement qu'est-ce que cela change? Ce qui compte c'est AIMER ( et s'aimer soi-même un peu aussi par la même occasion ).
Je me suis mise dans ma propre case, une case aux bord très perméables, une case poreuse, où tout le monde est le bienvenu.
Tu dis que "ça se trouve, ça fait des années que je passe à côté d'une partie de moi, et c'est quand même plutôt con". J'ai ressenti aussi la même chose, mais à la limite mieux vaut "tard" ( ça va à peine la trentaine ce n'est pas tard) que jamais.
Bienvenue ici et n'hésite pas à poser des questions.

[lorant]

Je plussoie Scanno et Ptiboudin.

J'ajouterai que, pour moi, tu ne t'es pas vraiment "trompée d'étiquette". Celle que tu avait choisi était sans doute ce qui te convenait le mieux jusqu'à présent. Il peut y avoir tout un tas de raisons pour lesquelles tu te découvres aujourd'hui une attirance pour les hommes (ou du moins l'un d'entre eux).

Je pense que c'est un effet secondaire de la lutte pour la reconnaissance des homosexuels: il est devenu couramment admis que l'on naît avec une certaine orientation sexuelle, que l'on ne choisit pas. Mais on suppose aussi, implicitement, que cette orientation est inaltérable, qu'elle n'évolue pas. Voire qu'elle correspond à un mécanisme purement biologique... Je crois que c'est bien plus complexe que cela.

Au final, plutôt que de se demander si l'on est attiré par le bon sexe, je pense qu'il vaut mieux se demander si l'on est attiré par la bonne personne...

[Ascagne]

Tout d'abord, bienvenue sur ces forums et merci pour ton témoignage, à la fois touchant et rédigé d'une façon hautement sympathique !

Par où commencer ... J'ai commencé à me dire que je n'étais pas hétéro vers 20 ans. Sur le moment, quand j'ai réalisé que les demoiselles me faisait de l'effet, ça m'a un peu surprise parce qu'il me semblait bien que j'étais amoureuse d'un garçon. Le garçon en question ne voulant pas de ma petite personne, j'ai décidé que je n'étais pas amoureuse de lui, que ce n'était que mon esprit qui cherchait à s'auto cacher la vérité. Comme j'avais quand même un doute et qu'un pote m'a dragouillée, je me suis laissée faire, pour voir si ça me plaisait (j'en conviens, c'est pas méga classe). Après avoir roulé deux ou trois pelles à ce garçon, je me suis rendue à l'évidence, j'aimais vraiment pas ça. Dans ma petite tête, c'était tranché, j'étais lesbienne.
(...)
Alors je regarde en arrière. Je me demande si mon raisonnement a planté quelque part ou si c'est mon coeur et mes hormones qui bug d'avoir été trop longtemps inactifs.

C'est sournois, hein ? Ça me rappelle les premières fois où je me suis senti troublé en présence d'un garçon torse nu. Comme j'avais déjà été plusieurs fois amoureux de filles, mais n'avais encore jamais eu de relation, je pensais que je lorgnais sur tout ce qui bougeait parce que j'étais frustré, et je me disais : "Houlààà, il faut vraiment que tu te trouves une copine, tu t'imagines des choses". Je ne pensais pas du tout que l'un n'excluait pas l'autre...

Comme ça c'est pas passé de manière très propre, que je suis quelqu'un de très timide et de très complexée, je n'ai finalement eu de vraie relation qu'avec cette personne. Comme j'ai quand même 27 ans, ça me complexe encore plus et du coup je m'en sors pas.

Là je pense que tu te dirais toi-même la même chose, mais : tu n'as aucune raison de complexer. Il n'y a pas de parcours obligé, ni de "score" ou de "tableau de chasse" à avoir obligatoirement accumulé à telle ou telle époque d'une vie. Chacun passe par des expériences très différentes. Il y a des gens qui démarrent leur vie amoureuse/sexuelle très tard, d'autres très tôt ; certains qui accumulent les relations courtes et complexent parce qu'ils n'en ont jamais eu de longue, et ceux qui n'ont eu qu'une ou deux histoires poussées mais complexent parce qu'ils pensent qu'il faudrait en avoir eu davantage... bref, personne n'est content Tu as eu la chance d'avoir une relation approfondie avec une fille que tu aimais (de façon réciproque, semble-t-il), c'est déjà beaucoup ! Le reste viendra en son temps

Alors je regarde en arrière. Je me demande si mon raisonnement a planté quelque part ou si c'est mon coeur et mes hormones qui bug d'avoir été trop longtemps inactifs. Et y'a un truc quand même... c'est que ce garçon que j'ai embrassé pour savoir si j'aimais ça ou pas, il embrassait quand même SUPER MAL. Et que, quand bien même j'aurais été hétéro, j'aurais pas aimé ça.

Ou peut-être, tu n'as pas aimé ça parce que ce garçon ne t'attirait pas et/ou que tu n'éprouvais rien pour lui. Ça, quelle que soit l'orientation sentimentale/sexuelle, en général, ça n'aide pas à apprécier un baiser !

Dans tous les cas, je me dis que si je ressens ça, c'est qu'il y a baleine sous gravillon et qu'il faudrait quand même que j'éclaircisse ça parce que ça se trouve, ça fait des années que je passe à côté d'une partie de moi, et c'est quand même plutôt con.

Entièrement d'accord avec toi là-dessus ! Mais je ne dirais pas que c'est con (en tout cas pas de ta part en particulier)... c'est juste compliqué. C'est normal d'avoir du mal à s'y retrouver !

Je sais que je suis la seule à avoir la réponse, mais si quelqu'un se reconnaît même vaguement, juste de savoir que je suis pas la seule à m'être plantée d'étiquette et à être sortie d'un placard pour rentrer dans un autre, ça me rassurerait ^^"

Je pense qu'il vaut mieux oublier les placards. Enfin, l'avantage du "placard bi" est qu'il laisse beaucoup plus de liberté que les placards hétéro et homo, donc à tout prendre, si tu as peur de te sentir seule, tu peux te définir comme bi pour le moment et voir ce que ça donne. Mais l'essentiel est de faire comme tu le sens ! Quel que soit le sexe de la personne en face, ce n'est pas évident d'être très amoureux de quelqu'un sans savoir si c'est réciproque. Mais ça peut valoir la peine de se lancer. Donc... va à ton rythme, ne précipite pas les choses, essaie de ne pas trop te focaliser sur le fait que c'est un garçon et d'écouter plutôt ton coeur (comme disent très bien la plupart des chansons Disney™). Surtout, si ça devient réciproque, sois franche avec lui, n'aie pas peur de lui expliquer ton histoire, et au besoin fais lui comprendre que tu as besoin de ne pas aller trop vite. Si c'est un garçon bien, il t'écoutera, sinon tu en trouveras un autre plus attentif
Bon courage en tout cas, et n'hésite pas à parcourir les témoignages de ce forum, tu en trouveras sûrement qui recoupent tes propres interrogations !

[biartemis]

Les réponses des forumeurs sont très completes, je rajouterais juste que avoir peur de ne pas avoir d'experience de relations est une utopie. Toutes les relations sont nouvelles, c'est un éternel recommencement d'une certaine maniere. Aucun experience est la meme que l'autre, donc pas de stress (ce qui compte sur le plan sentimental et sexuel en terme de relation)

[Aelia]

Ce que vous me dites m'aide un peu à y voir clair. C'est vrai que le plus simple est sans doute de ne pas se poser de questions et d'attendre de voir ce qui arrive, mais si c'était aussi simple, ça se saurait.

En tout cas, y'a bien un truc que je dois admettre, fille ou garçon, ce qui me fait surtout peur c'est de me prendre une veste (c'est quand même jamais agréable !) :-/

[jsp]

Bonjour Aelia

Je viens de lire ton témoignage. tu es désemparé, et ça semble normal aux vues de ta faible expérience et des principes que tu dois avoir enfouis bien profondément dans le cerveau comme chancun d'entre nous.
Je pense qu'il faut arrêter de te chercher une étiquette "homo", "hétéro"... A quoi bon... Tu es toi ! Alors si tu ressens quelque chose pour ce garçon alors qu'auparavant tu n'as ressenti ce genre de choses que pour des filles, essaie et tu verras bien. Ca ne te coutera rien a priori et tu seras fixée. Il embrasse mal... Peut-être était il sous le coup de l'émotion... L'amour, même physique, ce n'est pas qu'une question de technique... Il y a plein de facteurs qui peuvent intervenir.
Moi aussi je suis timide, moi aussi j'ai eu peu d'expériences, moi aussi je suis paumé... Mais je pense que c'est ce "trouble" qui fait notre richesse. Il faut essayer de l'atténuer en le cultivant... Un peu paradoxal, mais c'est la seule façon de savoir où on en est.

Courage, rien de dramatique dans ton cas... Juste quelques doutes.

JSP